vendredi 2 octobre 2009

Un clown dans l'espace

Guy Laliberté est arrivé à la station spatiale ce matin. Assez difficile de passer à côté : ça fait des mois qu'on médiatise le fer-de-lance de la bourgeoisie moderne, le milliardaire le plus sympathique de l'heure, de surcroît philanthrope. Le contraste est assez éclatant dans un contexte de crise où les médias deviennent provisoirement un autel sur lequel on sacrifie les Vincent Lacroix et Earl Jones, le tout au nom d'une économie juste et toute-puissante.

Voyez, le capitalisme n'est pas seulement le terrain de jeux d'une poignée de personnes assoiffées de pouvoir et prêtes aux pires exactions. Guy, lui, a fait sa fortune avec le Cirque du Soleil, une entreprise qui met du bonheur et du rêve dans la tête des gens. Guy, lui, a sa fondation, One Drop, pour assurer qu'un jour tout le monde aura accès à de l'eau potable. Et il va bientôt nous livrer un message de l'espace. Dieu, s'il existait, en serait sans doute jaloux.

Mais le dude est quand même milliardaire, non? Considérant la répartition lamentable des richesses actuelles, n'est-il pas un acteur d'avant-plan des inégalités sociales qui en découlent? Considérant que le profit est la partie impayée du travail et qu'il a du en faire beaucoup pour s'embourgeoiser, n'est-il pas partie prenante des rapports d'exploitations qui sont propres au capitalisme?

Bien qu'il ne soit pas un criminel de guerre ni un avocat du cheap labor, Guy Laliberté n'incarne pas non plus le mythique capitalisme à visage humain. Dans une époque où l'establishment ne cesse de charcuter nos droits sociaux et de creuser le fossé entre les riches et les pauvres, on tente désespérément d'occulter la racine du problème en surexposant l'image du bourgeois bienfaiteur.

Ce n'est pas sans rappeller le tourbillon médiatique autour de Neil Armstrong, grâce auquel plus rien n'existait, ni guerre ni ségrégation raciale, seulement l'être humain qui marche sur la lune. À ce propos, voici une chanson fort intéressante de Gil Scott-Heron, intitulée "Whitey on the moon".

Aucun commentaire:

Publier un commentaire